Association Française de Zootechnie

French association for animal production

Baisse de la consommation de protéines animales en France - Perspectives 2025

Le Ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt a mis en ligne 16 fiches "tendances et impacts" suite à son étude prospective sur les comportements alimentaires en 2025. L'une d'elles est consacrée aux protéines animales, et à la tendance à la baisse de leur consommation telle qu'elle est observée en France. Diverses "sous-tendances" de consommation à horizon 2025 sont également décrites, et leurs impacts sont mis en perspective.

Tendances

En 2016, d'après les chiffres du CIV, 70 % des protéines consommées en France étaient d'origine animale. Cependant, d'après la fiche "tendances" réalisée par Blezat Consulting, le Crédoc et Deloitte Développement Durable, la consommation des protéines animales est actuellement sujette à une diminution. Parmi les moteurs de cette baisse : une sensibilité accrue aux impacts de l'alimentation sur la santé, aux impacts environnementaux de l'élevage et au bien-être animal, ainsi que des évolutions démographiques (vieillissement de la population et mode de vie urbain). 

L'étude présente les évolutions de la consommation de produits animaux depuis la crise économique de 2008 : on constate une baisse des achats de viande par les ménages (à l'exception du poulet), une hausse des achats de produits élaborés à base de viande, une relative stabilité des produits de la mer, ainsi qu'une augmentation de la consommation de produits laitiers (à l'exception du lait de consommation qui diminue). Cette baisse globale de la consommation de viande entraîne en effet un report vers d'autres aliments d'origine animale (oeufs, fromages), ainsi qu'une augmentation de la demande en protéines végétales. Ces évolutions sont expliquées à la fois par des raisons conjoncturelles (hausse des prix), et des raisons structurelles (transfert de la consommation vers des produits élaborés, nouvelles attentes sanitaires, sensibilité environnementale...).

Plusieurs "sous-tendances" de consommation sont mises en lumières dans cette fiche "tendances", avec à chaque fois une prospective d'évolution jusqu'en 2025. 

  • Le flexitarisme se définit par un objectif de manger à la fois moins de viande, mais aussi une viande de meilleure qualité. En 2015, 23 % des adultes de 15 ans et plus ont déclaré avoir limité leur consommation annuelle de viande. Cette tendance tendrait à se développer en France à l'horizon 2025.
  • Le végétarisme/végétalisme se caractérise par le banissement des protéines animales dans l'alimentation. L'ampleur de ce mouvement au cours de la prochaine décennie est difficile à mesurer : il pourrait rester marginal, ou bien alimenter la tendance flexitarienne. Les crises sanitaires, la prise de conscience des enjeux environnementaux, le militantisme et le poids médiatique important des associations anti-viande pourraient amplifier ce phénomène.
  • Les protéines végétales (et, dans une moindre mesure, les algues) constituent un marché dont l'augmentation actuelle est importante. Les légumineuses, les céréales et le soja sont directement impactés par le transfert de consommation vers d'autres sources de protéines non animales. Les algues, qui ne font pourtant pas partie de l'univers culturel alimentaire français, commencent à séduire les consommateurs européens grâce à leurs propriétés nutritionnelles et leur originalité.
  • L'entomophagie bénéficie d'une large couverture médiatique, suggérant qu'il pourrait devenir envisageable de manger, en France, des insectes à l'horizon 2025. Cette perspective nécessite cependant une évolution règlementaire, et la consommation d'insectes pourrait rester anecdotique en alimentation humaine, même si elle connaît un développement non négligeable dans le cadre de l'alimentation animale.
  • Les aliments issus des biotechnologies (acides aminés de synthèse qui pourraient remplacer en partie les protéines animales) représentent des opportunités pour 2025, à condition que soient levées les barrières culturelles anti-produits de synthèse.

Impacts

Ces tendances à la baisse de consommation de protéines animales et de report de consommation vers des produits plus élaborés, ou contenant plus de protéines végétales, vont avoir des impacts sur l'ensemble des filières de production agro-alimentaire, à l'horizon 2025. Les différents impacts de cette baisse de consommation sont détaillés dans la fiche "impacts" qui suit la fiche "tendances" de l'étude prospective commandée par le Ministère.

  • Les impacts sur les produits vont concerner les contenants (nouveaux emballages) et les contenus (innovations sur des produits plus élaborés contenant à la fois des protéines animales et des protéines végétales).
  • Les impacts sur la communication et le marketing seront importants : on verra apparaître une segmentation du marché de la viande (offre haut de gamme, produits élaborés...), un marketing basé sur les bonnes pratiques des filières d'élevage, pour faire face aux risques d'affrontements médiatiques entre anti et pro-viandes.
  • Les impacts sur la restauration commerciale concerneront à la fois l'offre de repas végétariens/vegans, avec une adaptation des cartes et l'élaboration de menus spéciaux, mais également l'offre de repas carnés, avec une contre-tendance axée sur une consommation revendiquée de viande, qui fera appel à une offre plus qualitative en termes de production et de provenance des produits.
  • Les impacts sur la restauration collective dépendront des modifications potentielles des recommandations (diminution possible de la quantité de viande, diffusion de l'offre de repas végétariens...).
  • Les impats sur l'artisanat devraient être plus faibles que sur la grande distribution. Les bouchers-charcutiers pourraient bénéficier d'une clientèle qui cherchera une qualité garantie et des produits élaborés.
  • Les impacts sur les circuits de distribution pourront entraîner l'apparition d'enseignes spécifiquement végatariennes, ainsi que la diminution de la taille des rayons de viande brute au profit des produits transformés ou compatibles avec une alimentation végétarienne.
  • Les impacts sur la logistique et les grossistes seront liés aux tensions d'approvisionnement en viande de boucherie. Cela pourrait induire le développement de filières spécifiques (basées sur un type spécifique d'élevage ou d'abattage, par exemple), et de filières spécialisées en protéines végétales (dont les algues).
  • Les impacts sur la transformation sont directement dépendants des changements de consommation observés, et de l'augmentation du niveau de transformation globale des produits. Des investissements en R&D auront pour cible le développement de produits plus riches en protéines, de solutions appétentes de repas basés sur le végétal, et l'introduction de protéines végétales dans les produits carnés.
  • Les impacts sur la production agricole sont divers. L'élevage avicole devrait a minima se maintenir. Les éleveurs de porcs rencontreront des difficultés qui pourront être compensées par les reports partiels de consommation sur la charcuterie. Les éleveurs de bovins et ovins rencontreront également des difficultés, mais les impacts devraient être plus faibles pour les producteurs laitiers grâce au report de consommation sur les fromages. Le risque de déprise des territoires d'élevage est également mentionné.

Plusieurs stratégies sont proposées sur cette fiche "impacts" pour contrer les impacts négatifs de cette baisse de consommation de protéines animales. Par exemple, la valorisation des viandes labellisées et haut de gamme, et de la production de proximité. Les pouvoirs publics pourraient soutenir l'extensivité, pour réduire les volumes tout en occupant des surfaces équivalentes. Les exploitations agricoles peuvent aussi choisir une voie de diversification de leurs productions et de leurs activités.

Ces nouvelles tendances de consommation créent des opportunités pour développer les cultures de protéines végétales, qui se heurtent actuellement à des freins techniques et économiques. Les protéines alternatives, telles que les algues et les insectes sont confrontées à des limites techniques et culturelles, mais représentent également des sources d'innovations et d'opportunités pour les années à venir, notamment en alimentation animale.

L'intégralité des fiches "tendances et impacts" sur les comportements alimentaires en 2025, dont fait partie la fiche résumée ici, peut être téléchargée sur le site du Ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt.